• Comme Une Flèche Qui Traverse Le Vide

     

    On est devenu soi-même imperceptible et clandestin dans un voyage immobile. Plus rien ne peut se passer, ni s'être passé. Plus personne ne peut rien pour moi ni contre moi. Mes territoires sont hors de prise, et pas parce qu'ils sont imaginaires, au contraire : parce que je suis en train de les tracer. Finies les grandes ou les petites guerres. Finis les voyages, toujours à la traîne de quelque chose. Je n'ai plus aucun secret, à force d'avoir perdu le visage, forme et matière. Je ne suis plus qu'une ligne. Je suis devenu capable d'aimer, non pas d'un amour universel abstrait, mais celui que je vais choisir, et qui va me choisir, en aveugle, mon double, qui n'a pas plus de moi que moi. On s'est sauvé par amour et pour l'amour, en abandonnant l'amour et le moi. On n'est plus qu'une ligne abstraite, comme une flèche qui traverse le vide. Déterritorialisation absolue. On est devenu comme tout le monde, mais à la manière dont personne ne peut devenir comme tout le monde. On a peint le monde sur soi, et pas soi sur le monde.

     

    Gilles Deleuze

     

    Comme Une Flèche Qui Traverse Le Vide

     

     

    « Je Me Permets La Pesanteur d'un Instant »
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  • Commentaires

    1
    Jeudi 31 Juillet 2014 à 05:42

    texte magnifique et photo qui me parle tant. Merci Doc, bises à vous deux.

    A quand votre voyage à l'île de la Réunion, que nous ayons le plaisir de vous accueillir?

     

    2
    Lundi 4 Août 2014 à 11:10

    Merci Mato pour ton invitation,mais pour l'instant nous sommes en plein déménagement pour le Morbihan.

    Je te retourne l'invitation, si un jour, vous passez par la Bretagne !

    Bizavous2

    3
    Samedi 9 Août 2014 à 08:35

    Beau texte : le bras de l’archer, la flèche et la cible ne faisant qu'un.

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